Par Me Antoun Alsaoub, avec la collaboration de Sabrina Roberge
Dans l’affaire Payette c. Guay inc., une entreprise commerciale (Entreprise A) a acquis des actifs de sociétés détenues par un individu. Ce contrat prévoyait également (1) des clauses de non-concurrence et non-sollicitation et (2) que l’individu travaille comme consultant pour l’entreprise suite à l’acquisition. Cet individu devient ensuite un employé de l’entreprise, avec un contrat de travail à durée indéterminée. Quelques années plus tard, l’employeur le congédie sans motif sérieux l’employé.
L’individu est ensuite embauché par une entreprise concurrente (Entreprise B). L’Entreprise A tente d’obliger l’individu à respecter les clauses restrictives de la convention de vente d’actifs, par voie d’injonction contre celui-ci et contre l’Entreprise B.
La jurisprudence interprète différemment les clauses restrictives, selon qu’elles soient contenues dans un contrat d’emploi ou dans un contrat de nature commerciale. En effet, il y a un déséquilibre présumé dans les relations entre les employeurs et les salariés (contrat d’emploi) alors que ce déséquilibre n’est pas présumé dans les relations entre les vendeurs et acheteurs (contrat de nature commerciale).
Afin de protéger l’employé, le législateur a adopté l’article 2095 du C.c.Q. :
« L’employeur ne peut se prévaloir d’une stipulation de non-concurrence, s’il a résilié le contrat sans motif sérieux ou s’il a lui-même donné au salarié un tel motif de résiliation ».
Il est important de connaître la raison pour laquelle la clause de non-concurrence a été conclue entre les parties afin de savoir si celle-ci se rattache effectivement à un contrat d’emploi, ce qui constitue un élément essentiel pour l’application de l’article 2095 C.c.Q.
La Cour suprême s’exprime ainsi dans l’arrêt Guay:
L’analyse vise à déterminer la nature des obligations principales du contrat-cadre et pour quelle raison et dans quel but les obligations accessoires de non-concurrence et de non-sollicitation ont été assumées.
Dans le contexte factuel en l’espèce, les clauses de non-concurrence et de non-sollicitation ne pouvaient être séparées du contrat de vente d’actifs. Ainsi, l’article 2095 C.c.Q. ne trouvait pas application, et donc les clauses restrictives devaient être interprétées en vertu d’un contrat de nature commerciale. Donc, celle-ci ont été jugées valides.